Du 5 au 8 juillet 2019 (La vidéo de la traversée est en bas de page de l'article) Ça y est. Le grand jour est arrivé. Mon équipage frétille d’impatience à l’idée d’entamer leur plus longue traversée... Ça fera peut-être rire des marins expérimentés, mais pour mes petits matelots la perspective de passer au moins 3 jours d’affilée en mer et un peu intimidante. Un dernier coup d’œil à la météo : toujours pareil, un peu de largue et travers pour les prochaines 48 heures puis sûrement du près pour finir, presque pas de houle. Il faudra juste arriver avant le 9 si on ne veut pas terminer dans 25 nœuds de face. À 9h30 mon ancre quitte une dernière fois le sable espagnol, si tout va bien le prochain mouillage sera breton ! Le vent joue aux absents en ce début de matinée, à peine 2-3 nœuds, c’est donc au moteur que je quitte la baie de La Corogne en saluant une dernière fois le phare d’Hercule. Vers 11 h le vent monte progressivement entre 8 et 12 nœuds, j’avance bien au bon plein puis au travers entre 5 et 6 nœuds. Le temps reste couvert et le brouillard s’installe le long de la côte dans l’après-midi pendant quelques heures. Un peu avant le coucher du soleil un appel retentit sur le canal 16, quelqu’un cherche à contacter un voilier faisons cap au nord-est parti de La Corogne, un mile derrière lui... Vu la fréquentation locale, il semblerait bien que ce soit nous. Un échange VHF plus tard, nous apprenons qu’il s’agit de Karakter, voilier ayant partagé notre ponton au port de La Corogne. Ayant plus ou moins la même route que nous, ce petit échange VHF rassure quelque peu mon équipage. On apercevra la petite loupiote de caractère durant une bonne partie de la nuit. Et il est bon savoir qu’un autre voilier se situe tout proche et à l’écoute ! L’heure du dîner a sonné, des ravioles aux champignons à la crème, parsemées de parmesan et de roquette font le délice de mon équipage. Les quarts de 6 heures se mettent en place. Une couche-tard et un lève tôt, le débat est vite clos, ma capitaine commencera donc la veille de 23 h à 5 h et mon commandant prendra le relais de 5 h à 11 h. Durant la nuit une houle d’environ 1 mètre avec quelques trains plus hauts me secoue un peu. Le vent changeant en force et en direction, j’essaie de maintenir un cap de 45 degrés. Ce vent instable oblige à des réglages fréquents, mais j’avance toujours entre 5 et 6 nœuds pour l’instant, on tient une bonne moyenne ! Le temps couvert rend la nuit bien noire, les feux de navigation de Karactère restent bien visible, mais celui-ci comme prendre une joue une route légèrement divergente. Des éclairs sur l’avant-bâbord inquiète un peu ma capitaine qui préfère maintenir ce cap plutôt que de continuer à naviguer de conserve. Mise à part notre copain de route il n’y a vraiment pas un chat dans la zone, ni visuellement ni sur l’AIS. À force de chercher un signe de vie à l’horizon les yeux de ma capitaine commencent à lui jouer des tours et inventent des Lumières fantômes, au moins ça occupe ! À 5 h du matin, le vent tombe à 10 nœuds et tourne vers nord-nord-ouest, mon nouveau cap est de 50 degrés. Le ciel s’éclaircit un peu et quelques rares étoiles accueillent Fabien qui vient prendre son quart, une soupe chaude à la main. Au petit matin, Karactère a disparu et rien à l’horizon n’attire notre attention. Fabien profite de son quart pour mettre les deux lignes à l’eau. Quelques heures plus tard, et chose rare depuis le début de la Kawanerie, deux thons mordent à l’appât ! Le premier est remonté, quant au second, Fab le relâcha, certes un peu groggy, mais libre ! Autant vous dire que les 2 prochains jours ne manquèrent pas d’oméga 3 ! Les filets levés c’est en tartare que mon équipage dégusta cette belle prise. Le temps reste couvert et mon équipage un peu dans le coton alterne les siestes. Un groupe de dauphins nombreux et très rapide coupe mon sillage, je ne sais pas vers quoi ils bondissent comme ça, mais ça m'a l'air urgent, même pas un petit détour vers mon étrave ! À trois reprises j’aperçois quelques baleines, mais difficile de les identifier vu la distance à laquelle se trouve. Mon commandant arrive après quelques tentatives à capter un bulletin RTTY avec la BLU : pas de changement prévu. Le vent de 10 nœuds reste de secteur nord-ouest, je continue ma route au 45 degrés. Le courant est avec nous, le gps donne un nœud de plus que mon loch. Ma vitesse font reste entre 5 et 7 nœuds. À 19 h 30 j’ai parcouru environ 175 Mn en 34 heures, ma moyenne est à plus de 5 nœuds ! Durant toute la journée, les nuages ne nous quittent pas. En fin de journée, le vent chute à moins de 5 nœuds ce qui est bien trop juste pour du largue. Le moteur reprend du service. Le quart de Aude passe tranquillement à admirer le plancton phosphorescent particulièrement présent cette nuit. La mer reste toujours déserte en dehors d’un cargo nommé Kelly qui passe au loin. Vers 5 h, le vent commence à revenir, Fabien en profite pour remettre les voiles. Les couleurs ocre du lever de soleil rendre absolument ce moment magnifique. Durant cette journée le vent tourne au Nord nord-ouest je suis maintenant au prés et file à plus de 6 nœuds. Deux dauphins nous saluent rapidement. L’AIS détecte quelques cargos, nous ne sommes donc pas tout seuls dans ce Golfe ! Dans l’après-midi, nous captons un bulletin météo avec la BLU qui est confirmé quelques heures plus tard par le cross Etel à la VHF. Les prévisions restent comme prévu. En début de soirée, le vent monte entre 13 et 18 nœuds ce qui me rend particulièrement ardent, mais surtout je file à plus de 6 nœuds et à ce rythme nous appareillerons vers Belle-Île en pleine nuit ! Ce qui ne plaît guère à mon équipage. Ne connaissant pas le coin, nous préférons arriver de jours dans les parages. Notre décision est prise, je me mets à la cape et prenons un ris dans ma grande voile. L’effet est immédiat, tout en étant moins ardent je ralentis à 4 nœuds. Pour combler cette avance, mon équipage décide tout de même de capeyer une petite heure, le temps de trinquer à la Galicia sans alcool pour leur probable dernière dernière soirée dans le golfe de Gascogne. Mon Commandant profite de cet instant face au soleil couchant pour offrir à Aude une magnifique bague surmontée d’un mabé mahorais ! Je ne sais pas si c’est à force de regarder le soleil, mais il m’a semblé qu’Aude avait l’œil quelque peu humide... Cette belle parenthèse refermée l’organisation de la nuit se met en place. Les quarts de 6 h c’est de la place à des quarts de 3 h afin d’être tous les deux réveillé pour l’atterrissage du matin. Le lever de lune rouge vif lors du premier quart reste splendide. Le ciel clair et étoilé de la Voie lactée miroite avec le plancton phosphorescent. Durant la nuit le trafic s’intensifie. Notre route s’incline vers l’Ouest, le vent venant directement de Belle-Île. Ayant toujours de l’avance nous ne cherchons pas à tirer des bords. Au petit matin, du vent de Nord s'établit. On affale le solent, libère le ris et envoie le génois. Et c’est parti pour des bords de près ! À 9 h, la côte se dessine et les dauphins se chargent du comité d’accueil ! Il est finalement 12 h 30 quand nous rentrons dans la petite anse de port Herlin au sud de Belle-Île. Mon ancre chatouille enfin le sable breton. Avec une moyenne de 4,8 nœuds, nous venons de parcourir 361 miles nautiques en 75 heures. Le Gwenn-ha-Du remplace le pavillon espagnol et une bonne douche plus tard c’est tout fier que mon équipage s’endort pour une sieste bien méritée ! A bientôt et bon vent ! Film de la traversée :
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