Du 22 juin au 4 juillet 2019 C’est sous un ciel bien gris que mon ancre quitte la baie de Corrubedo. Hého ! Le soleil ! L’été ce n’est pas que le 21 juin, il faut revenir là ! Le vent a tourné au Sud ouest et souffle à 10-15 kt. Le vent a tourné au Sud ouest et souffle à 10-15 kt. Je contourne le cap et me voici au largue. La houle en travers de ma direction me ballotte pas mal. Nous ne devrions pas rester sur ce bord bien longtemps de toute manière, l’autre amure devrait être plus confortable. Joshua, le régulateur d’allure, reprend du service et gère comme un chef. Les derniers miles vers Muros se font toute voile dehors et en ciseaux ! La houle me pousse maintenant gentiment. Durant ces quelques bords, le soleil ne daignera pas se montrer, mais un dauphin timide fera son apparition le temps de saluer mon Commandant avant de replonger pour ne pas être vu par ma Capitaine. À quai au port de Muros nous y restons 2 jours le temps de laisser passer un petit coup de vent. Parait-il que le village vaut le détour. Et d’un point de vue logistique faire une lessive devient plus qu’urgent ! Les marineros responsables du port méritent leur médaille de gentillesse et de serviabilité, d’autant plus qu’il parle français ! Ce qui rend les choses bien plus faciles… surtout quand la machine à laver décide de n’en faire qu’à son tambour ! Le 23 juin mon équipage se réveille aux doux bruits de nombreuses explosions et cloches sonnant à toute volée ! Non non les indépendantistes Galiciens n’y sont pour rien… il s’agit juste du 3ème jour de la San Juan, ou fête de la Saint Jean, très populaire en Espagne. Feu nocturne sur la plage et tir de feu d’artifice en plein jour rythment la journée ( oui en plein jour on ne voit rien de ces tirs on est d’accord… !). Partant à la découverte des recoins de cette cité, une petite erreur d’itinéraire mènera l’équipage jusqu’au cimetière à travers une belle forêt d’eucalyptus qui leur permettra de faire un stock d’eucalyptus et fenouil. De nouveau dans la vieille ville, ils en parcourent les ruelles pavées de pierres et de petites arcades. De vieux greniers trônent encore sur leurs pylônes. En ce jour de la San Juan, une grande partie des rues sont décorées de fleurs habilement réparties sur le sol. Étoiles, cœurs flamboyants, coquillages ou frises plus abstraites colorent les pavés sur le passage prévu de la procession. Quelques autels montés à intervalles réguliers ponctuent également le parcours. Des remorques pleines d’eucalyptus au destin enflammé rejoignent la plage. Le soir venu, c’est sur la Plaza Pescadeira qu’ils trouvent à se restaurer. Gambas al ajillo, langostinas à la plancha, berberechos se frayent un chemin jusqu’à leur table ! Après tout cet iode ingurgité, des envies de sucré leur secouent les papilles. Des flashbacks de churros du coin de la rue guide leur pas, mais la churreria semble fermée. Triste nouvelle… ! En route donc vers la fête foraine à l’autre bout de la ville. Devrait bien y en a voir par là-bas… d’autant plus qu’on est en Espagne ! Ben non ! Ils y trouvent plutôt un énorme sardinade ! Accompagné de Broa au maïs et de vin c’est la tradition en ce jour de la San Juan. Un long foyer de braise s’étale sur le sol, des sardines y grillent par centaine sous l’œil gourmant des dizaines de personnes attendant dans la file d’attente. Du vin et du Broa sont présents en quantité sur les longues tables. Tout est gratuit et à volonté ! La convivialité prend ici tout son sens. Bon, mon équipage souhaitait des churros, mais un morceau de Broa c’est pas mal aussi ! Quelques manèges et structures gonflables occupent les gamins pendant qu’adultes mangent et boivent avec entrain. Minuit approche, les feux de joie aussi. Aude et Fab retourne vers la plage. Le premier feu est déclaré. Ça flambe vite et haut ! Des millions de brandons illuminent le ciel ! À proximité, de petits feux prennent volontairement forme. Enfants et adultes s’amusent à les sauter 7 fois, cela éloignerait les maléfices. Mon équipage se prête aux jeux, on n’est jamais trop prudent ! Les feux s’éteignent progressivement, la fatigue les envahit, les revoici à mon bord… avec le linge ! Mes réservoirs d’eau pleins, me voici filant à 6 nœuds dans la Ria. Le vent initialement prévu entre 8 et 12 nœuds oscille plutôt entre 15 et 20knt. Les bords de près s’enchainent sous solent et un ris. La Punta Carreiro derrière nous, je passe au largue entre les récifs et la côte. Le vent chute et n’arrange pas ma trajectoire. Non seulement maintenant je me traine, mais je file droit vers les cailloux. Et oh, les copains... ça ne vous dit pas de débrider mes voiles ?! Aussitôt dit, aussitôt fait, mais le vent n’en fait qu’à sa tête, à se rythme se n’est plus du largue, mais de la dérive... ! Plus le choix mon moteur prend le relais. D’autant plus qu’une belle houle de Sud Ouest ne rend pas le moment très agréable. Arrivés dans la baie de Sardineiro, nous passons la nuit devant une plage à l’ouest de la Punta Arnela. Le petit village à proximité se trouve joliment encerclé de collines verdoyantes. Bien abrités par le cap Finistère nous y restons quelques jours. L’occasion donc de finaliser la douche en imprimant un coude permettant d’évacuer directement l’eau grise de celle-ci par le lavabo, évitant ainsi un raccord vers un passe-coque. Mon équipage en profite aussi pour s’essayer à la pêche à pied... mais ils sont bien loin de me ramener un plateau de fruits mer là ! Comme si trifouiller le moindre petit trou dans le sable allait rendre couteau ou autre.... tsss...! Y a plus qu’à se renseigner et développer la technique... Du coup ils en profitent pour crapahuter entre les rochers et admirer crabes et anémones. Passant par le haut de la pointe et admirant le point de vue, leur marche déboule sur un portail qu’ils escaladent en essayant de se faire discrets... Parait-il qu’ils étaient sur un chemin privé ? Arrivés au village, d’anciens greniers en pierres habillent les ruelles descendant vers la mer. La structure des rues en forme de « caniveau géant » laisse imaginer le niveau d’humidité de la région. En tout cas, le temps est au beau fixe et à la pétole, pour le moment. Et oui la pétole, un peu trop même... mon commandant craint que je passe par dessus mon orin et me le coince dans mon safran, ce qui ne manqua pas d’arriver durant la nuit. Le problème sera réglé avec une manille à la hauteur de la bouée et un plomb au bout de l’orin. Ainsi la longueur de l’orin passant dans la manille s’adapte aux variations de la hauteur d’eau grâce au plomb qui le maintient bien tendue. Mes parties sensibles sont alors moins ciblées ! L’eau ne dépassant pas 15 degrés sous ma quille, Aude et Fab se tente une petite baignade le lendemain le long de la plage. Il parait que c’est vivifiant ! D’autant plus que des douches sont disponibles. Pour finir la journée, c’est l’estomac lesté de couteaux, d’amandes de mers et d’une pariade de poissons qu’ils rentrent à bord pour une nuit plus sereine que la précédente. C’est vers 11 h que nous levons l’ancre, le temps est un peu nuageux, mais le soleil nous réchauffe régulièrement. Le vent de Sud reste obstinément autour de 5 nœuds, trop peu pour avancer au portant surtout qu’il nous reste 35 miles. La houle d’un bon mètre venant de mon travers s’amuse à me faire rouler sans répit. C’est donc au moteur que je longe le cap Finisterre avec ses flancs abrupts tombant dans l’océan. Le sémaphore à son sommet est régulièrement caché par les nuages. Nous sommes au point le plus à l’ouest du Vieux Continent. La côte se fait plus rocailleuse avec de gros rochers de granit couverte d’herbe rase. Mon commandant, mais les lignes à l’eau, un maquereau mort aussitôt. Il s’agira de la seule prise de la journée ! Le brouillard s’invite subitement à la fête, on ne voit plus la côte et un banc de brume semble nous talonner. Le radar allumé celui-ci s’avère être un véritable allié entre ces quelques voiliers et bateaux de pêche. Malheureusement, le nuage semble vouloir rester coller au rivage et disparaît complètement quelques milles plus loin. Le vent lui se renforce et nous permet de couper le moteur. Les voiles se gonflent. Mon génois est tangonné. Les dauphins nous saluent timidement à plusieurs reprises. Le vent forci jusqu’à 18 nœuds, je glisse maintenant à 6 nœuds les voiles en ciseaux plein vent arrière. L’Ensenada de Corme dépassée nous jetons l’ancre derrière la digue du petit port de pêche de Corme qui nous abrite plutôt bien de la houle. Après 43 miles nous ne sommes plus qu’à une journée de La Corogne. Délimité par sa jetée bordée de palmier, Corme semble être un petit village bien tranquille. Cependant, il n’est pas l’heure des visites, mais plutôt l’heure de la dégustation. En papillote dans le four, le maquereau accompagné de patates, carottes et poireaux diffuse une agréable odeur. La première prise de la saison est un régal et mon équipage peut se coucher pour rêver à de future pêche miraculeuse. Le lendemain, la houle ne rentrant plus dans la baie et le vent ayant tourné au nord nord-est nous décidons de nous déplacer vers la plage au fond de la baie derrière les anciens Viveros. Après une récupération acrobatique de mon orin qui était parti se perdre sous mon safran au cours de la remontée de l’ancre, nous voilà en face d’une belle plage de sable blanc et ses gros rochers noirs. Entre bricolages de la table de cockpit, baignade et resto, la journée se passe agréablement bien. Le soleil couchant nous offre des couleurs de braise. Au loin se dessinent les contours d’un vieux pêcheur relevant ses nombreuses palangrottes dans sa barque. Aujourd’hui, le ciel est gris et le vent absent. Je jongle toute la journée entre voile et moteur. En début d’après-midi le soleil réchauffe enfin mon pont. Quelques dauphins viennent jouer avec mon étrave. Plus surprenant, je traverse pendant plusieurs minutes un énorme banc de crabe rouge qui semble se laisser dériver ! Ils sont des centaines et on se demande bien d’où ils viennent et où ils vont pour être dans le bleu comme ça ! Mon commandant s'essaie de nouveau à la traine, mais sans succès, il aurait mieux fait de pêcher les crabes avec une épuisette ! Ça y est, le phare d’Hercule se dresse à l’horizon. Mon équipage aperçoit également de nombreux menhirs non loin de ce fameux phare. Ce célèbre phare datant de l’antiquité romaine est le plus vieux encore en activité au monde. Mon équipage se prête à rêver, les tours modernes de La Corogne disparaissent laissant place aux temples romains encerclés de petites maisons en pierres. La baie se peuple de galère et de vaisseau marchand phénicien... Mais le choix du mouillage nous ramène à la réalité. La météo nous prévoit 15 à 22 de nord-est pour les jours qui suivent, l’Ensenada de Mera juste en face le port de La Corogne fera un abri parfait. N’ayant pas de fenêtre météo avant une bonne semaine pour la traversée du golfe de Gascogne, c’est quelques jours de mouillage se soldent, entre des essais de pêche, réparation du moteur de l’annexe et création d’un jeu de société dont je n’ai pas encore tout compris. Ah ce jeu ! Répondant au nom de « Tout azimuts ! » il s’agit d’une histoire de terre à découvrir via les océans, d’un plateau tournant et de petits triangles. Quoi qu’il en soit entre découpage et coloriage de centaines de cartes à jouer ma capitaine a eu de quoi s’occuper ! Bon ça n’a pas l’air encore tout à fait au point, mais ça avance ! Le 2 juillet nous voilà au port de La Corogne après une ligne droite d’un peu moins de 3 miles sous génois seul avec 15 nœuds de vent arrière. C’est à la Marina Real que nous élisons domicile quelque temps, celle-ci ayant l’avantage d’être en plein centre-ville. Pensant avoir pas mal de temps à passer ici, voilà qu’une jolie fenêtre météo semble s’installer à la fin de la semaine. Nous y passeront finalement que deux nuits. Tout juste le temps de faire quelques courses, de changer le gaz, de récupérer quelques colis et d’acheter des chaussures à talon à Madame (je n’ai pas compris pourquoi, ce n’est pas pratique sur mon pont et il me semble qu’en Bretagne on achète plutôt des bottes non ? ). Ils ont tout de même profité une dernière fois de la charcuterie espagnole avec une belle planche ibérique le premier soir ! Quand même ! Le 4 juillet la cambuse est pleine, le stock de fruits secs, chocolat et banane sont à bord ! Mais ayant un peu d’avance sur les préparatifs, ils profitent de leur après-midi pour aller voir de plus près le phare d’Hercule. Haut de 57 m il fut construit au 1er siècle par les Romains. Autrefois plus bas, une rampe en faisait le tour afin d’y monter le combustible permettant d’éclairer la lanterne d’huile dont la flamme se réfléchissait sur un grand miroir incurvé. La légende veut qu’Hercule ait battu et enterré la tête d’un géant qui terrorisait la région. Il ordonna alors la construction d’une tour à cet endroit et fonda à côté une ville nommée Crunia ( A Coruna ) en souvenir d’une femme qui vivait là et dont il était tombé fou amoureux. La Tour fut également dotée d’une lampe qui ne s’éteignait jamais. En 1788, la Tour fut restaurée est recouverte d’une façade néoclassique décorée d’une bande ascendante rappelant la rampe d’origine. Puis une galerie supérieure abritant la lanterne actuelle fut ajoutée.La zone qui entoure le phare se prête bien à la balade avec ses petits sentiers qui traversent la lande. À cette époque de l’année, la bruyère et les ajoncs en fleurs forment de magnifiques tapis colorés. De retour à mon bord, mon équipage appareille en direction du ponton gasoil avant de retourner au mouillage avant la traversée. D’ailleurs, ce ponton gazole c’est toute une histoire, pour y accéder il faut sortir de la marina contourner la citadelle et se diriger vers le fond de l’autre port, la marina Coruna. Jusque-là, tout va bien, mais quand après 10 minutes d’observation on arrive à comprendre exactement l’endroit où se situe le fameux ponton gazole, on a un petit moment d’hésitation... Situé entre une zone de corps mort et une passerelle menant au catway, la zone de manœuvrabilité reste très restreinte... La douceur est de rigueur et ma Capitaine s’en sort avec brio ! À 22h15 mon ancre est de retour au fond de l’Ensenada de Mera. Quand elle en sortira, ce sera pour entamer la plus longue traversée pour mon équipage. L’excitation monte ! Un dernier coup d’œil à la météo confirme les prévisions précédentes. Les deux premiers jours devraient se faire au travers ou au largue selon les moments avec un vent aux environs de 10 nœuds. Le troisième jour quant à lui devrait nous réserver des bords de près avec un peu moins de 15 nœuds. Pas de houle significative pour la traversée. Cela nous semble être de bonnes conditions. Un steak, des haricots verts pour prendre des forces et hop... au lit ! les nuits suivantes risque d’être moins reposantes ! A bientôt et bon vent !
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